Le devoir de Mémoire.
"Que reste-t-il de nos amours
Que reste-t-il de ces beaux jours
Une photo, vieille photo
De ma jeunesse..."
Comme le chantait Charles Treney, que restera-t-il de notre drag après notre passage sur terre? A la lueur de la triste actualité : Frida Salo une copine drag de Lyon organisatrice de la glam against the machine s'est envolée pour le paradisco. Rest in power, sister. Elle était férue et passionnée par l'histoire du drag. C'est une référence et une connaisseuse qui s'éteint. Juste un regard sur son profil instagram montre qu'elle n'était pas dans un schéma classique centré sur sa pratique personnelle mais au contraire sa pratique semblait tournée vers la découverte et la mise en valeur des autres. Et c'était remarquable.
Cette tragédie me renvoie au sujet de la transmision de nos mémoires. Mémoires LGBT, et le cas particulier de la mémoire drag, encore plus parcelaire. Je me souviens que, cela s'était déjà produit auparavant. A mes débuts, je pense en 2015, Athéna Palass dont je conserve aujourd'hui encore précieusement une bague, s'était éteinte. Que reste-il d'elle dans la mémoire communautaire ?
Par le prisme de DragFrance, on s'est donné une mission de conserver des archives du drag(s). Quels sont les moyens que nous possédons pour garder un souvenir de nos adelphes et avec quelle fidélité ?
Les fantômes du numérique
L'activité d'un artiste drag se mesure facilement sur les réseaux sociaux. Nous sommes des artistes visuels, et nous publions beaucoup afin d'être remarqué. Le profil d'Athéna est toujours en ligne sur instagram et sur facebook. Cette présence numérique fantômatique est-elle suffisante pour parler de mémoire ? A l'évidence non, de plus, nous n'en sommes pas maître du media. Laisser ce savoir, même partiel, dans les mains de Méta ne me semble pas satisfaisant. Mon premier réflexe par rapport à Frida fut de commander une archive des éléments publiques de son profil à ranger dans un disque dur dédiée de DragFrance. Et de prévoir une discution avec ses proches, sur comment garder respectueusement son souvenir, une fois la tristesse de la perte moins vive.
A notre époque numérique, les profils sur les réseaux sont loins d'être les seules traces de nos pratiques. Vidéos, interview, mémoires universitaires, podcast, les supports digitaux sont multiples. Avec DragFrance, on essait, comme on peut, de conserver cette mémoire dans un linktree, un drive qui semblent être notre meilleur outil, comme le fait BigTata pour les mémoires LGBT.
La matérialité
Mon drag est connu pour mes costumes. Dedans j'aime intégrer des morceaux, des pièces d'autres drags, à l'image de la bague d'Athéna. Je conserve physiquement dans mon appartement quelques pièces issues d'autres copines. Le drag, c'est aussi des oeuvres artistiques matérielles, des costumes coutures, des accessoires uniques, des perruques sculpturales. La conservation de ces objets est problématique.
Si un héritage de tantines en tatas existe et rend tant service en début de drag. Il n'est pas valué en dehors de ce cadre. La seule exposition de costumes se rapprochant de nos communautés que j'ai pu voir était au philharmonique de Paris à propos de la branche particulière qu'est le Club Kid. L'exposition était centrée sur la musique electro, et le Club Kid un courant parmis d'autres.
Le droit à l'oubli
J'aimerais ajouter ce petit paragraphe. Il y a quelques années des copines encore plus anciennes dans le game m'avaient remis une boite de flyers et d'affiches des années 90's. J'avoue qu'aujourd'hui dans mes multiples déménagements, je ne sais plus où elle se trouve. Je suppose chez mes parents. Parmis ces affiches, les copines m'ont indiquées que certains visuels ne seraient pas publiables. Parmis les artistes représentées certaines ont transitionées par la suite et elles n'ont pas l'envie de se revoir dans un personnage qui ne correspond pas à leur vie actuelle. Cela induit une balance entre le droit à l'oubli et le devoir de mêmoire. L'importance du respect de la personne doit rester central. Sans mentir, conserver des archives non publiables au vue du coût de l'espace dans mon studio parisien, pose aussi la question de la pertinence et du côut spacial que je suis prêt investir. XD
Une mémoire à protéger
Avec la maintreaminisation du drag, la multipilication des articles, l'accroissement de l'interêt journalistique est une réalité. Rien qu'au mois d'octobre 3 livres sont sortis sur le drag. Seulement, il est important de mettre en perspective ces supports de mémoire puisqu'ils sont soumis à des intérêts économiques souvent extérieurs à notre communauté.
RPDR est une machine de communication gargantuesque dont chacun essait de tirer sa part du gâteau. Les story telling et les archétypes sont des outils de marketing qui gomment des réalités plurielles pour rendre l'information plus digestes aux audiences élargies. Dans notre socièté d'entertaiment, la fabrique de la célébrité, la starification des personnalités sont aussi des vecteurs qui appuyent ou allègent des aspects de l'histoire pour mieux les accomoder à son narratif. Blame it on the edit comme dirait RuPaul.
Si les médias de masses se souviendront des artistes populaires, j'espère que nos petits médias alternatifs se souviendront des tatas de troquets, des folles de caves, des fées d'after, ou des dykes de pmu : nos existences qui ne cadrent pas avec des objectifs mercantiles.
Le Palace de Maison Chéri.e
✨ Le Palace de la Maison Chéri*e #3✨ 🥰 Mars 2023, Flowers ! GROUNDBREAKING 🥰 Le Palace de la Maison Chéri*e, c'est votre soirée drag du vendredi soir, rythmée par des jeux, performances, et DJ set....
https://www.facebook.com
Vous pourrez me retrouver la semaine prochaine, Vendredi soir au Titi Palacio pour une soirée bingo, ponctuée de performances accompagnée de Babouchka Babouche, Emily Tante et Mokish.
Le Palace de MC est un évenement mensuel, sans prétention qui permet de faire tourner les membres de l'association. Le nom est une référence à la mythique boite de nuit : le Palace des années 70 (et au nom du lieu qui nous acceuille). J'en profite pour partager l'interview de Jenny Bel'Air, ancienne physio de ce lieu interlope qui ferma ses portes en 1983 en pleine hécatombe du VIH.
Quand les lectures dérangent les fachos...
Le 4 Décembre, sur twitter, je commentais l'actualité aux Etats Unis : Une lecture pour enfants à Colombus en Ohio avait été annulée car un groupuscule armé avait empêché les familles d'atteindre la bibliothèque. Ces mouvements d'extrême droite masculinistes inquiétants ont intensifié leurs actions aux Etats Unis en ciblant en particulier les événements de lecture publique par des artistes drag. Je rappelais que les bibliothèques avec qui je travaille se souviennent de l'hacèlement en ligne qu'avait subit la bibliothèque Louise Michel en 2019 pour la tenue de telles lectures.
Ces lectures existent toujours. Ce sont les copines des contes à pailettes. Elles lisent toujours à la bibliothèque Louise Michel et à la Gaïté Lyrique. Cependant elles ne font pas ou très peu de communication sur les réseaux, bien moins qu'avant cet incident. Si l'objectif de ces mouvances fascisantes étaient de nous ranger au placard, de nous empêcher de jouir de l'espace publique comme tout le monde : leur objectif était atteint. J'exprimais ma crainte de voir ce vent mauvais souffler sur les braises de nos conservateurs de France.
Si je m'exprimais dessus, c'est parce que depuis un an, je lis assez régulièrement de l'ordre d'une fois par mois. J'apprécie ces événements, et je démarche moi-même pour en organiser. Je fais relativement peu de communication sur les réseaux, notamment par crainte. Je n'ai subit qu'un troll anglophone. C'était n'importe quoi. ça n'avait pas eu d'impact sur mon activité. Son profil montrait des armes et des opinions clairement fascistes. J'ai juste signalé/bloqué le profil. Mais ça avait suffit à me questionner car l'event ciblé était un tout petit rendez-vous lors d'un festival dans une MJC, où sur place, il y avait grand maximum 20 personnes, toutes activités confondues.
Une suite d'attaques qui se succèdent.
+ Le 5 Décembre, TPMP diffuse une vidéo sur un événement pour parents et enfants co-organisé par la Maryposa à Bordeaux. Elle reçoit une vague de haine en ligne. TPMP est connue pour attiser et amplifier les polémiques réactionnaires. Pour eux, nos vies sont des objets de débats. Peu leur importe le respect des personnes, et de nous livrer à des hordes de trolls.
+ Le 9 Janvier, une animation "Unique en son genre" en bretagne par la compagnie Broadway French fait l'objet d'une polémique similaire. D'abord l'assaut est mené par l'ancien parti conservateur chrétien de Christine Boutin dans un communiqué de presse. Puis elle est reprise par une pétition d'un candidat du parti Reconquête qui obtient 2500 signatures puis encore d'une autre pétition. La mairie de Lamballe assume son choix, et maintient le spectacle qui se passe bel et bien.
+ Le 24 Janvier, la mairie de Toulouse annonce "réorienter" vers un public majeur, une lecture drag pour enfants afin apaiser des tensions avec un groupuscule identaire : La Furie Française. Le maire est proche de sens commun et de la manif pour tous. En parallèle, elle demande la dissolution du groupuscule auprès du ministre de l'Intérieur, reconnaissant le côté menaçant à l'ordre public de ce groupuscule. Cependant on sait ces dissolutions n'ont pas d'impact réel. Un groupe est dissous, un autre se constitue. Ce dernier avait fait une pétition avec 5000 signatures. Au final, l'atelier de lecture de Shana Banana et Brandy Snap qui se passait sans problème depuis 4 ans a été annulé, c'est donc les victimes du harcèlement qui subissent encore une double peine.
+ Le 4 Février Maëve, aka La Briochée, participante de RPDR France S1, après avoir défendu les lectures sur Twitter dénonce l'usage sans son accord d'une photographie sur un tract de Reconquête contre la "propagande LGBT". Elle annonce vouloir porter plainte.
Quel lobby ?
Malgré le fantasme d'un lobby LGBT organisé, en réalité, les drags sont des artistes indépendants issues d'une minorité même au sein de notre communauté. Notre milieu artistique n'est pas particulièrement organisé pour ce genre de situation. Ces déflerlantes de haine peuvent très vite nous submerger et nous isoler. Je ne saurais pas personnellement comment y répondre si cela m'arrivait.
Tout les profils drags ne sont pas par essence militant. Le drag est un d'abord un art, une technique théatrale communautaire. Maryposa dit qu'elle n'avait pas conscience en commençant le drag, à quel point sa pratique serait politisée. Répondre à ce genre de polémiques demande des ressources, des connaissances, un réseau que souvent nous n'avons pas individuellement. Et déjà avoir la force émotionnelle d'encaisser cette violence n'est pas une évidence. Nombre d'attaques sont des atteintes personnelles, des accusations calomnieuses, des insultes et parfois des menaces de mort.
En face de nous, les personnes qui pilotent ces attaques sont issues de groupuscules, de partis politiques, d'associations ou de médias. Le fait que leur pétitions collectent des milliers de signatures est un signe non-pas de légitimité, mais plutôt d'organisation. Ils ont des moyens humains et matériels conséquents, ils peuvent imprimer/distribuer facilement des tracts. Les titres des articles dans la presse sont timides à pointer l'origine biaisée de ces polémiques et préfèrent titrer sur le sensationnalisme de la rencontre atypique entre drags et enfants.
A côté, le drag commence à devenir mainstream. Cet art s'expose de plus en plus à tous.tes. Cet objet culturel est désormais présent à la télévision, bientôt sur France2. Notre milieu communitaire dont il est issu va, de fait, devoir encaisser une violence supplémentaire.
Quelles réponses ?
Ce constat étant posé. Comment réagir ? Comment répondre à ces attaques ? Quelles sont les réponses qui ont été apportées dans les cas évoqués? Je fais un tour de ce qui s'est passé afin de garder aussi une trace pour moi-même.
Il est important de mobiliser nos réseaux, notre audience et d'exprimer explicitement notre soutiens aux copaines. So-li-da-ri-té. Il y a plusieurs façons de le faire, plusieurs terrains sur lesquels s'opposer. Le milieu drag est riche d'un renouveau depuis 6/8 ans. Il dispose de quelques moyens pour y répondre, même s'ils sont récents.
+ Maryposa a fait appel à une copine drag dont le métier est chargé de plaidoyer dans l'associatif, pour l'aider à rédiger une réponse à la vidéo de TMTP. Si le Sidragtion est une action sur un tout autre sujet, il permet néanmoins de se rencontrer et de tisser des liens avec d'autres artistes qui ont des sensibilités communes et des compétences différentes. "Faire communauté" est et sera toujours important. Ce sont des mécaniques à renforcer.
+ Dans la même idée, Maryposa a mis en place un petit groupe avec Shana, Brandy, moi-même et on espère bientôt intégrer d'autres drags lecteur.rices afin d'échanger nos expériences et se soutenir dans ce cadre d'activité. Rien n'en est ressorti mais un outil, un cadre est posé.
+ Un de mes premiers réflexes fut de répondre à qlq tweets, faire un thread, de pointer les biais de certains articles. Cela a clairement des limites : répondre aux trolls, c'est mettre des pièces dans une machine à débats stériles qui ne s'arrête jamais. J'ai fait ça une semaine, c'était fatigant. Le but était de ne pas laisser le monopole de la parole à nos détracteurs. Mais au bout d'un moment, j'ai aussi arrêté car je ne voulais pas non plus m'exposer au point d'en devenir une cible.
+ Maëve, La Briochée qui grâce à sa participation à DRF a obtenu un rayonnement assez large, qu'on peut qualifier de figure du drag francophone a pris position en défendant les lectures. C'est important d'avoir des personnes visibles qui prennent des postures en soutien de nos actions. Cependant, elle a fini par être une cible collatérale de Reconquête notamment dans le tract qu'elle dénonce.
+ Si les réactionnaires ont leur réseau de média qui ont fait des articles sans consulter les artistes concernés. D'autres journalistes, chercheu.se.rs qui nous suivent depuis un moment ont publié des articles. Je pense à Marion Cazaux, Maëlle Lecorre, Fabien Randanne et bien d'autres en lien dans ce post qui ont publié sur le sujet dans le respect de notre culture, de nos personnes.
+ Dans les lectures, nous ne sommes pas seul.e.s. Il s'agit aussi d'une question liberté de programmation de nos bookers. L'Association des Bibliothécaires de France a publié un communiqué de soutien et a réaffirmé au nom de la diversité et du pluralisme la place des lectures par des artistes drags au sein des bibliothèques. Ce soutient venu de cette institution reconnue d'utilité publique est important car il est garant d'une déonthonlogie.
+ Actup Sud Ouest a publié des vidéos témoignages de familles habituées des lectures sur son compte instagram qui s'expriment sur cette polémique. Nos détracteurs ne sont pas des gens qui viennent à nos lectures. Ils écrivent sur la base de leurs présomptions, de leur peur de la difference, de leur délires identaires. Nous travaillons avec un public réel qui lui est heureux de nos interventions. Ces témoignages font chaud au coeur, et sont très concrets.
+ Une autre démonstration fut de communiquer sur le succès des lectures maintenues afin de montrer que nos événements sont safes et bienveillants. Shana et Brandy ont ainsi pu inviter des médias à venir observer d'autres lectures qui elles étaient maintenues.
+ Bien que je ne sois pas convaincu du poids des pétitions. Une Pétition de soutien existe pour les lectures de Toulouse, elle arrive bientôt à 5000 signatures.
A la re-lecture des événements passés, je contaste que même si individuellement, on puisse se sentir dépassé. Nous avons aussi des allié.e.s qui se sont mobilisé.e.s pour répondre à ces attaques. Il est important d'en prendre conscience. Nous ne sommes pas seul.e.s et il est important de renforcer ces liens.
Il est certain, que ces attaques vont revenir sur la table un de ces 4. Mais j'espère qu'on sera plus préparé à y répondre.
GLAM Against the Machine Spéciale #16 : Bas-Rock & Des Cadences
J'ai l'honneur d'être la marainne de cette Glam Against the Machine sous le signe du baroque et de la cadence.
Le Samedi 20 Février à 22h enligne sur Fb. LIEN ICI
Confinement et Show virtuel
Durant la crise du Covid est venue l'impossibilité de performer, la fermeture des scènes. Aujourd'hui les shows reprennent timidement, cette période fut particulièrement difficile pour les artistes drags, au statut professionnel souvent instable. La Kahena a d'ailleurs organisé une collecte pour venir en aide à certains artistes. D'autre part, grâce à la magie des internets et la force des réseaux sociaux, les shows virtuels ont été une solution de replis pour continuer à performer. #DragContest, #Dragantaine, #Queerantine, #OuiOuiBaguettes sont des shows qui se sont illustrés en France.
Pour ma part, ça a relancé mon intérêt pour ma chaîne youtube qui était à l'abandon depuis longtemps. En effet, il y a des années, alors qu'il y avait peu/pas de scènes ouvertes drags à Paris, je filmais de temps en temps une vidéo. Vue la pauvre qualité de mes réalisations, je n'avais pas insisté. D'autres copines comme Calypso Overkill essayait déjà à cette époque à se mettre aussi à youtube notamment grâce aux concours de lipsync en ligne. Elles ont tenues et continuent encore.
D'autres ont disparu, on se souviendra (non) de la chaine de Gay One en 2017, qui reprenait brut les recettes vidéos de WhoPresents avec les transformistes du Labo. Il a fallut attendre l'aire des influenceurs et instagrameurs comme Kam Hugh pour que dans la scène française il y ait des drags avec un follow conséquent sur youtube. C'est étrangement un phénomène générationel bien que certaines drags se sont toujours illustrées par leurs vidéos comme Rose et Punani.
Peu avant le confinement, j'étais justement en train de m'équiper en matiériel photo/vidéo. Cependant mon notebook n'est pas fait pour le montage vidéo, donc je ne dépend encore de mes contacts et surtout de ma soeur Emily Tante. On a été invité par ma nièce Bichette puis ma voisine Gazelle à participer à des shows virtuels sur twitch. C'est une façon de fonctionner totalement différente de la scène. Je ne sais pas si je poursuiverai mais voilà l'une de nos vidéos : Enjoy !
Dans les chaines drag fr existantes avec +1K de follow, il existe aussi Hitsublu, Adantko ... N'hésitez pas à mettre en commentaires d'autres chaines.
Wikipedrag #2 - Lewis Raclette
Ce second Wikipedrag date encore de l'année dernière. il a été revu et actualisé à postériori, mais le principal reste dans le contexte originel. Cette fois, je m'étais rendue dans mon bar préféré du marais : Les Souffleurs. Les mercredis soirs y étaient consacrés à la King Factory. La factory a maintenant déménagé à la Mutinerie.
Cette scéne, organisée par Jésus la Vidange et Thomas Ochcio, est un mélange d'ateliers, de scène ouverte et de blind test où les drags kings y sont célébrés.
Après un show torride dans la cave bondée des Souffleurs, c'est Lewis Raclette qui m'a rejoint à l'extérieur pour reprendre son souffle.
E.F. - Vraiment torride cette cave ! Dis-moi, pour commencer, je suis un peu curieuse de ton drag name, pourquoi Lewis Raclette ?
Lewis - Tout d'abord je suis franco-anglais, je voulais conserver cette consonance.
Ma colocataire (Ambroise) m'a aidé à trouvé un prénom british, Lewis, qui fait référence à Lewis Carroll, l'auteur d'Alice aux pays des merveilles, une oeuvre qui me tient à coeur.
Je voulais une deuxième partie française, et j'ai pensé directement à Raclette tout d'abord parce que la sonorité vient casser le côté joli de "Lewis" et que j'ai été un grand fan de fromage. J'aime ce contraste entre le côté classe de Lewis et le côté un peu cartoon de la Raclette, histoire de ne pas se prendre au sérieux.
E.F. - d'où le côté cartoon que tu citais précédemment.
Lewis - Pour le moment, je ne me concentre pas sur le mix. Je prends des chansons qui me font vraiment kiffer, et j'y met l'intention que je désire.
Lewis - On peut voir de tout et n'importe quoi, mais dans le bon sens du terme.
E.F. - Ca fait un moment, que j'observe la scène drag et notamment drag king, au travers des dragendas. Cette année, il y a un boom. Il y avait avant et toujours la Drag My King, maintenant il y a la King Factory, Mamita parle aussi de mettre en place un Dragathon King. Et par ce foisonnement, j'ai l'impression de voir une plus grande variété dans le king.
E.F. - Ma question suivante va porter sur les familles, les collectifs / house of drags. Quelque part, la factory c'est assez familial ?
Wikipedrag #1 - Crucifist
Il y a un an, j'avais décidé de relancer les Fées du Marais à coup d'interviews (qu'on appelera "Wikipedrag", merci Reine Mayr pour le nom). plot twist (non) ça ne s'est pas fait. En parallèle, Flambloyantes un très bon podcast (j'y reviendrai) venait de commencer avec celles.eux de ma génération. J'avais décidé plutôt de m'intéresser à une génération émergente de performeurs drags, par aussi curiosité personnelle. Il y a casiment un an entre l'itw originel et la version présentée ici, ce qui est aussi intrigant.
J'ai donné rendez-vous à un.e pote.sse du doux nom de Crucifist afin de me raconter un peu son drag. Nous sommes au Ze Nice show d'Aliyah Xpress et Babouchka Babouche, installés dans les canapés usés pendant que les performeurs enfilent leurs habits de lumière et que le public arrive.

Enza Fragola - "Alors pourquoi donc ce drag name de Crucifist ?
Ensuite je fais bien la part des choses entre Crucifist, et moi. Ce ne sont pas du tout les même personnes. Je fais une distinction nette.
EF - Oui, j'étais là c'était à l'Extravag'Enza Dalidead ! Première Perf ?
Crucifist - Oui première perf en public ...enfin ...après j'avais déjà fait quelques perf. Ma première vraie fois, c'était à la mutinerie mais j'étais pas en drag, c'était ma coloc qui m'avait maquillé.
EF - Oui, il y a une photo sur ton instagram (ici). C'est étonnant, donc tu as été directement attiré par l'aspect performatif.
Crucifist - J'ai bien des inspirations mais elles ne sont pas forcément liées au drag comme Christine Boutin, Bernadette Chirac mais surtout le catholicisme baroque.
J'aime tout particulièrement les grosses églises très chargées qui dégoulinent de dorures. Je trouve ça écrasant de ridicule et d'excès. Quand quelque chose qui se veut spirituel mais qui est perclus dans le matérialisme, c'est assez drôle. J'aime beaucoup les images saintes, les visages torturées, les statues gothiques, les reliques exposées au public... Ces inspirations ne sont pas toujours perceptibles dans mon "produit fini", que ce soit en look ou en perf, mais elles sont toujours là dans un coin de ma tête.
Minima Gesté m'inspire dans le sens où elle s'engage, elle prend de plus en plus la parole dans les médias et la sphère publique, sans pour autant faire sa pub dessus. Il y a une fore d'humilité chez Minima qui est impressionnante, qui n'hésite pas à donnes une chance à des drag plus débutantes aussi.
Crucifist - Dans ce cas, je vais citer Reine Mayr ! J'ai l'impression qu'on est assez proche niveau esthétique et humour, c'est stimulant de voir ce qu'elle fait.
Crucifist - Sinon je suis très fier de ma perf sur Notre Dame de Paris, que j'ai faite 2 jours après l'incendie, alors que les cendres étaient encore chaudes. C'était en réaction directe à l'actualité, j'ai réalisé le montage en 2-3h et c'est une de mes perfs les plus réussies.
Après il y a beaucoup de moment dont je suis fier car le drag m'apporte beaucoup, ça va être difficile d'en isoler un ou deux !
Merci Crucifist.
Retrouvez Crucifist en hôtesse du Karao-Pouf de la PowerPouf du 29 Février Spéciale Emo.
Photo 1 par Jean Ranobrac
Photo 2 par Maxanax
Photo 3 par @salomeoya